Prive-moi de ce rêve qui fleurit en moi, je t'en conjure par tous les Dieux qui ont visité ce corps, le mien. Maltraite-moi, laisse moi purger la peine de mon péché capital, de l'inceste qui sévit en moi!
Disparais, oublie que je t'ai côtoyé; disparais, mais reste enfui en moi! Doux souvenirs me laisseront imaginer ma vie si le rêve est devenu réalité! On m'avait dit que l'âge nous différenciait... mais j'oublie les mots à chaque frisson, à chaque fois que je me retiens de t'enlacer, de murmurer : je me rends, le démon a gagné! Ô si tu le savais! Je porte en moi toute la terreur du monde! Je veux oublier, ou je vais succomber au désarroi! Suis-je normale? Dois-je résister? Dois-je avorter cette passion qui grandit en moi, pour toi! Toi! Enfant! Bel homme! Qu'as-tu de si mystérieux! Si laid, si captivant! Je te hais... et j'ai envie de te posséder!
Je vais finir comme lui.
Humeur exaltée, des projets en millier, une assurance de fer, des idées d'enfer... ma folie et mon génie se côtoient chaque seconde !
Je ne suis qu'une copie de lui...
Extravertie, perturbée, fière à en perdre haleine, amoureuse d'autrui, la pudeur n'a plus sa place das ma vie... mon génie devient une folie !
Je suis comme lui.
Avec ma logorrhée : qui ose parler en ma présence? qui ose critiquer ce que je dis? tu me contredis? ma folie est désormais ma vie !
Je suis lui...
Coquette, jolie, sourire charmeur, délire de grandeur, dépense excessive... et mes cachets au chevet du lit !
Ce soir je me suis mise dans la tête que je laisserai malgré moi traîner quelques lettres ici, et là... Ce soir je combats mon manque d'inspiration, mon manque de respiration, mon manque d'oxygène, mon manque de lettres...
Ce soir je me suis résignée à battre toutes les lois de la gravité... dans mon univers il n'y pô de gravité, il y a juste des évènements graves qui flottent entre deux pensées...
Ce soir je suis venue enterrer mes lettres, leur faire des funérailles médiocres... Ce soir j'ai décidé de les tuer et devenir veuve à jamais !
Ce soir j'arrête d'écrire.
Ce soir j'arrête de lire.
Ce soir j'arrête...
Mais je n'y peux rien... Je n'y peux rien! Mon rêve d'un poème parfait me parcourt de mille frissons, me hante, et je rends les armes... abattue à jamais !
Je me tiens sur une plage aussi orgueilleuse que toutes les syllabes qui ont partagé ma vie, une brise vient caresser mon stylo desséché de son encre de lumière, il n'écrit que des cendres envolées et brise le silence d'une tempête colorée...
Un frisson d'espoir parcourt toutes les pages vides, avides de rimes, assoiffées de lettres, mais la brise ne fait qu'éveiller ses amours perdus !
Sur les pas des mots je trace un chemin périlleux, je les suis aveuglement, je me perds entre la splendeur d'un "A" et la discrétion d'un "U" et je pose mon dos contre un "K" pour espérer un repos passager.
J’entrevois au loin un majestueux "B" se dandinant avec fierté, nul ne peut le vaincre, même moi j'y ai songé et j'ai péri parmi les naufragés.
Il n'y a que le "Z" qui m'accepte sur son dos, m'offre une vue sur ma vie, et me laisse découvrir la beauté d'une danse interdite aux âmes... Toutes les lettres se croisent, s'effleurent discrètement et forment au loin des mirages merveilleux...
Penchée si haut, je ferme mes yeux, je réveille mes envies de vous, de mon merveilleux mirage, et je tourne le dos à ma réalité...
